Consequences du rechauffement

3.4.11 - Les conséquences d’un réchauffement planétaire


Nous allons examiner ici quatre des principales conséquences d'un réchauffement planétaire.

a) La montée du niveau des mers.

Une des conséquences à laquelle on pense en premier lieu lorsqu’on invoque un réchauffement planétaire est la montée du niveau des mers, avec ses effets néfastes sur les terres basses côtières (inondations, vulnérabilité aux tempêtes), comme les Pays-Bas ou les grandes plaines deltaïques (Bangladesh, Louisianne, etc.). Cette montée des eaux est le plus souvent attribuée à la seule fonte des calottes glaciaires. Nuançons.

L'histoire des derniers 140 milliers d'années nous apprend que les fluctuations du niveau des mers se sont faites au gré des alternances de stades glaciaires et interglaciaires, avec des chutes atteignant les 135 mètres.

Les chercheurs évaluent que le niveau marin s’est élevé de 12 cm depuis 1880. Il n’est pas simple d’évaluer cette élévation puisque la croûte terrestre n’est pas stable partout: dans une grande partie du Canada et de l’Europe, la croûte se soulève à cause du réajustement isostatique suite à la dernière glaciation, alors que dans certaines zones comme les zones deltaïques, elle s’abaisse à cause du poids des sédiments. Cette élévation progressive de 12 cm depuis 1880 est concordante avec le réchauffement observé. Deux facteurs sont à considérer quand on cherche à cerner les causes d’une élévation du niveau marin: la fonte des glaces, bien sûr, mais aussi la dilatation thermique des eaux océaniques. En fait, on évalue que près de la moitié de l’élévation a été causée par la dilatation des eaux de la couche supérieure de l’océan reliée à leur réchauffement. Le réchauffement des eaux de l’océan profond causera aussi une montée du niveau marin, mais cette fois à beaucoup plus long terme, compte tenu que la circulation thermohaline est beaucoup plus lente. On a calculé qu’un réchauffement de 0,5°C des eaux de surface (le réchauffement depuis 1880) ont entraîné, par dilatation, une élévation de 5 cm. Les autres 7 cm de la montée des eaux depuis 1880 correspondent à la fonte des glaciers de montagne. Par exemple, on a observé des retraits importants de glaciers dans les Alpes durant les deux derniers siècles et plusieurs glaciers des Andes retraitent rapidement présentement. On peut donc s’attendre à ce que la fonte des glaciers de montagne contribue à gonfler l’eau des océans dans un proche avenir.

Le graphique qui suit exprime les prévisions de montée du niveau marin, selon les mêmes scénarios (SRES, IPCC 2001) que pour le réchauffement planétaire.

Source : http://www.grida.no/climate/ipcc_tar/wg1/fig11-12.htm

Pour le siècle à venir, l’IPCC prévoit que:

b) L’impact sur les écosystèmes

Les différents types de plantes ont différents mécanismes de fixation du carbone, ce processus qui fait que durant la photosynthèse le CO2 est converti en carbone organique. Sans entrer dans les détails, disons que pour certaines plantes, ce mécanisme passe par la synthèse de composés à trois atomes de carbone. C’est ce qu’on appelle la photosynthèse C3 qui implique les plantes dites plantes C3. Il y a aussi la photosynthèse C4, impliquant des composés à quatre atomes de carbone, et conséquemment les plantes C4 (maïs, canne à sucre, pâturages). Les plantes C4 sont capables de photosynthétiser à des teneurs atmosphériques de CO2 bien inférieures à celles qui sont nécessaires pour les plantes C3, mais aussi, elles répondent plus mal que les plantes C3 à une augmentation des teneurs en CO2; ce qui implique que dans un scénario d’augmentation du CO2 atmosphérique certaines cultures seront défavorisées par rapport à d'autres.

Au sein même du monde des plantes C3, différents types de plantes répondront de façons différentes aux changements de température et de taux d’humidité qui accompagneront les variations de teneurs en CO2. Ainsi, certaines espèces d’arbres supportent mieux les augmentations de température et de teneurs en CO2 que d’autres. Par exemple, le pin et le bouleau supportent bien les teneurs élevées en CO2, alors que le tremble et l’épinette dépérissent quand les températures deviennent trop chaudes. En somme, sans entrer dans les détails, on peut dire que l’abondance relative et la distribution de certaines espèces de végétaux dans un écosystème donné risquent d’être modifiées par un réchauffement planétaire, avec ce que cela implique sur les autres végétaux et la vie animale.

Les changements de température provoquent un déplacement des limites entre les zones de température et conséquemment de la migration des espèces dont la répartition géographique est contrôlée par la température. Ainsi on pourrait assister à la migration d’insectes nuisibles aux cultures ou tout simplement aux humains aujourd’hui confinés aux zones tropicales vers les zones tempérées actuelles, élargissant leur territoire de façon substantielle (exemple, l’insecte vecteur de la malaria qui ne peut supporter les hivers froids). La rapidité avec laquelle les changements de température se font pourront aussi avoir une influence. Certaines espèces pourraient ne pas avoir la rapidité de réaction suffisante (reproduction, colonisation) pour suivre le changement et carrément disparaître.

Dans le domaine marin, un réchauffement des eaux de la tranche de surface peut affecter la vie benthique. Les coraux en sont un bon exemple. La fameuse maladie blanche qui affecte présentement les récifs coralliens est considérée comme étant reliée au réchauffement de l’eau. Le coraux expulsent leur symbiotes algaires (zooxanthelles) et se voient ainsi dépérir (voir Vers une nouvelle décimation s4/decimation.coraux.html). On évalue aujourd’hui que 20% des récifs coralliens ont été détruits et que 40% sont en danger, par diverses causes dont le réchauffement des eaux superficielles.

c) L’impact sur la circulation de l’océan global (circulation thermohaline)

On a vu plus haut (point 3.2.4) que la circulation de l’océan global forme une boucle qui prend son origine dans l'Atlantique-Nord où les eaux froides (refroidies par les vents froids du Canada), salées, denses et bien oxygénées plongent vers les profondeurs. Il s’agit d’un cycle de 1000 ans environ. C’est cette plongée des eaux froides et denses de l’Atlantique-Nord qui constitue en quelque sorte le moteur de cette circulation en boucle. C’est la remontée locale (upwelling) de ces eaux froides riches en nutriments qui alimentent le plancton en surface et qui contribuent ainsi à la forte productivité biologique marine dans certaines régions, par exemple au niveau des pêcheries, comme sur les Grands Bancs de Terre-Neuve ou les côtes du Pérou. C’est aussi cette circulation thermohaline (i.e., reliée aux gradients de température et de salinité) qui redistribue la chaleur.

Un ralentissement, ou à la limite un arrêt, dans le transport des masses d’eau océaniques aura certes une influence néfaste sur la ressource halieutique et les climats en général. L’effet El Niño est un bon exemple de l’interrelation climat-circulation océanique-ressources marines. Un tel ralentissement peut être causé, au point de départ de la boucle, par un réchauffement des eaux de surface dans l’Atlantique-Nord et par une diminution de leur salinité par la fonte des glaces du Groenland et de l’Arctique.

Le graphique qui suit montre, à partir de plusieurs modèles, que déjà la circulation thermohaline décline depuis quelques décennies et que, sauf pour deux modèles, cette diminution ira en s’accentuant. Le zéro de base correspond à la moyenne des années 1961-1990.

Source : http://www.grida.no/climate/ipcc_tar/wg1/fig9-21.htm

Certains modèles vont même jusqu’à prévoir qu’une augmentation de 1% par an de la teneur atmosphérique en CO2 pendant 100 ans entraînera une coupure nette de la circulation thermohaline. Un autre modèle conclut qu’avec une augmentation de 1% par an, la coupure se produira lorsque la teneur atteindra 4 fois la teneur de base (280 ppm). Rappelons-nous que le taux d’augmentation de la teneur en CO2 atmosphérique a été en moyenne de 1,5 ppm (0,4%) par année durant les deux dernières décennies (voir plus haut).

d) L’impact sur « le temps qu’il fera » et les événements climatiques extrêmes

Le dernier rapport d’évaluation de l’IPCC présente une liste de changements probables à ce niveau reliés au réchauffement planétaire.

  1. Des maxima de température plus élevés et un plus grand nombre de jours chauds dans pratiquement toutes les zones continentales.
  2. Des minima de température plus élevés, moins de jours froids et de jours de gel dans pratiquement toutes les zones continentales.
  3. Des écarts de température réduits dans la plupart des zones continentales.
  4. Une augmentation de l’indice de chaleur (une combinaison température-humidité qui mesure les effets sur le confort des humains) dans la plupart des zones continentales.
  5. Un plus grand nombre d’événements extrêmes au niveau des précipitations.
  6. Une augmentation de l’assèchement estival continental, entraînant une augmentation des risques de sécheresse.
  7. Une augmentation dans l’intensité des vents de pointe des cyclones tropicaux.
  8. Une augmentation des moyennes et des maxima de précipitations reliées aux cyclones tropicaux.
Plusieurs de ces changements ont déjà été observés et même quantifiés dans certains cas durant la dernière moitié du 20ème siècle. Les changements 1 à 5 sont qualifiés de très vraisemblables (probabilité de 90 à 99% qu’un énoncé soit vrai), les autres de vraisemblables (probabilité de 66 à 90%) pour le 21ème siècle.

Tous ces résultats et ces données sont-ils fiables? Question légitime. ... Page suivante...


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